Fille, de Camille Laurens
Mon avis
Fille.
J’avais vu des avis sur le nouveau roman de Camille Laurens, mais je n’étais pas certaine de vouloir le lire. Voilà à nouveau un livre sur l’histoire de la pauvre femme… bon ! mais encore ? m’étais-je dit. Puis je l’ai retrouvé mis en avant chez ma libraire Le Passeur, au même endroit il me semble que Il est des hommes qui se perdront toujours un mois avant (non ?), c’est peut-être ce qui explique cet achat compulsif mercredi dernier. Bref, je démarre la lecture de Fille, vendredi matin, dans mon train, et je me surprends à accrocher, à m’identifier tout de suite.
Fille, c’est la vie d’une fille, d’une femme, d’une mère à travers les âges de la vie (enfin les premières décennies). Mais en fait c’est l’histoire des femmes d’aujourd’hui, de leurs mères, de leurs grands-mères, de leurs filles. Ce récit est accompagné par les grandes révolutions de la fin du XXe/début du XXIe, le droit de vote (enfin), le droit de travailler sans accord préalable du mari, le droit à l’avortement, le droit d’aimer qui l’on veut..
Laurence naît et grandit dans une famille qu’on ne pourra pas accuser de ne pas être progressiste mais qui est (comme nous tous ?) profondément marquée par les conventions sociales qui enferment la femme dans les devoirs et les interdits – l’homme aussi parfois, soyons honnêtes. Laurence ne connaît pas la pauvreté, elle n’est pas freinée dans son éducation, elle est aimée (à leur manière) par père et mère, elle connaît une sexualité et une vie amoureuse conventionnelles, mais c’est une fille. Et toute sa vie ce constat sonnera comme une défaite à son oreille.
Qu’est-ce que veut dire « être une fille » dans une époque où le droit social change et bouscule les mœurs, quand les conventions sociales de la fin de siècle dernier explosent à coup de révolution féministe ? – en France tout du moins.
« Mais moi, tout ce que fait un garçon, à part pipi debout (et encore), je peux le faire. C‘est juste que je n’ai pas envie. »
La 4ème de couverture
Laurence Barraqué grandit avec sa sœur dans les années 1960 à Rouen. « Vous avez des enfants ? demande-t-on à son père. – Non, j’ai deux filles », répond-il. Naître garçon aurait sans doute facilité les choses. Un garçon, c’est toujours mieux qu’une garce. Puis Laurence devient mère dans les années 1990. Être une fille, avoir une fille : comment faire ? Que transmettre ?
L’écriture de Camille Laurens atteint ici une maîtrise exceptionnelle qui restitue les mouvements intimes au sein des mutations sociales et met en lumière l’importance des mots dans la construction d’une vie.
Editions Gallimard
Fille – Camille Laurens
Editeur : Editions Gallimard, collection Blanche, 2020
Prix : 19,50€
« c’est merveilleux, une fille »