Lady Susan, de Jane Austen
Mon avis
Quelle GARCE cette Lady Susan ! Oui mais en même temps…
Lady Susan est une jeune veuve, mère célibataire, dont les atouts physiques et les belles paroles font tourner plus d’une tête. Depuis le décès de son mari, Lady Susan vit dans la décadence, additionnant les amants qu’elle n’hésite pas à prendre parmi les hommes mariés. D’une intelligence redoutable, elle s’amuse à faire plier la bonne société anglaise à ses désirs ! Monstre d’égocentrisme, elle se joue des autres, et même de sa propre fille, au mépris de leurs sentiments. Dans le nouveau monde de Lady Susan, il n’y a guère que ses propres désirs qui comptent. Malheureusement pour elle, l’argent ne coule pas à flot. La jeune femme ne voit qu’une solution pour réparer cette injustice : marier sa fille à un beau parti et vivre à leurs crochets. Elle serait alors assurée de sauver les apparences tout en gardant sa liberté et ses amants.
À travers sa construction épistolaire de ce court roman nous invite à découvrir la vie et les actions de cette jeune femme à la fois par le prisme du jugement de la société bourgeoise représentée par la belle-sœur de Lady Susan et sa mère ; et celui de sa propre correspondance intimes avec son amie Mme Johnson dans laquelle Lady Susan s’amuse à dévoiler tout son génie manipulateur.
En fait, elle est fascinante cette Lady Susan qui, malgré une mauvaise réputation grandissante, parvient à mener sa barque coûte que coûte en retournant toutes les situations à son avantage. On pourrait même quelque part comprendre et prendre en pitié ce personnage malfaisant. Il faut dire que du haut de ses 35 ans, Lady Susan découvre la liberté, après être passée de la main du père à celle du mari. Elle est pour la première fois responsable de sa propre vie, elle qui a été contrainte à sauver les apparences. Elle qui n’avait finalement jamais demandé à être mariée et encore moins à être mère.
Je me la compare volontiers à un jeune enfant qui, invité à une fête d’anniversaire, échappe enfin à la surveillance de ses parents et se goinfre de sucreries sous les yeux effarés des autres parents qui n’osent pas le gronder, mais finit par courir aux bras de son père quand le mal de ventre lui vient.
Observatrice attentive des mœurs bourgeoises et de la situation de la femme dans la société anglaise du XVIIIe siècle, Jane Austen nous laisse ici découvrir au fil des lettres un portrait presque féministe, qui sous les couvert du jugement de cette femme par la société, nous pousse à une critique douce de la bien-pensance.
Ne vous y trompez pas, Lady Susan est un être infecte ! Mais les normes sociétales ne le sont-elles pas tout autant envers les femmes ?
« J‘ai fait sentir au jeune homme quel était mon pouvoir et puis maintenant goûter le plaisir de triompher d’un esprit préparé à ne pas m’aimer »
Lady Susan – Jane Austen (traduction : Pierre Goubert)
Editeur : Editions Folio, collection 2€, 2006
Prix : 2€
La 4ème de couverture
Une veuve spirituelle et jolie, mais sans un sou, trouve refuge chez son beau-frère, un riche banquier. Est-elle sans scrupules, prête à tout pour faire un beau mariage, ou juste une coquette qui veut s’amuser ? Le jeune Reginald risque de payer cher la réponse à cette question…
Editions Folio